Pour exprimer nos vues sur 2021, nous ne pouvons pas ne pas revenir sur 2020, tant cette année a été extraordinaire, dévastatrice, singulière, déprimante, originale et néanmoins pleine d’espoir.

C’est évidemment le ou la COVID 19 qui restera à jamais dans les mémoires tuant plus d’un million de personnes à travers le monde. Sans précédent depuis un siècle, au moment où nous fêtions le centenaire de la grippe espagnole et ses 100 M de morts, cette pandémie a, en à peine deux mois, bouleversé l’existence de milliards de personnes, n’épargnant aucun recoin de la planète et mettant à l’arrêt pratiquement toute l’économie mondiale, ce qui n’était jamais arrivé en temps de paix.

De plus, ce virus a eu la particularité d’être totalement incontrôlable et difficilement maîtrisable par la communauté scientifique qui s’est lourdement trompée sans parler de la réaction des politiques, pris de court par une situation inédite.

MEA CULPA

Pour les investisseurs que nous sommes qui tentons de comprendre et d’anticiper en donnant des prévisions et en les traduisant dans les portefeuilles, cette année fut éprouvante, plus encore que 2008. Alors qu’il suffisait de relire notre newsletter de l’hiver 2020 et de faire tout simplement confiance aux Banques Centrales, nous avons voulu agir face à un virus que nous ne comprenions pas et à une sphère financière totalement déconnectée de la sphère réelle.

1/ La difficulté à sentir le choc économique et l’ampleur de la crise sanitaire
Le démarrage de la pandémie en Chine en janvier 2020 a été vu comme un remake du SRAS de 2003 lui-même né en Chine n’ayant provoqué que 774 décès uniquement en Asie. De plus les informations, certainement fausses, en provenance de Pékin sur le nombre de morts a évidemment trahi notre appréciation du danger. Nous vous écrivions le 28 février « au maximum il y aura 10 000 morts dans le monde » et « dans l’état actuel, il n’y a pas de raison de réviser en baisse drastiquement la prévision de croissance mondiale ». Cet aveuglement
reflète bien sûr les mensonges chinois mais aussi l’incertitude sanitaire et surtout la totale inconnue dans laquelle nous étions, aucun phénomène comparable n’ayant jamais eu lieu.

2/Puis la crainte d’une crise sans précédent sans rebond possible. Le scénario du L.
Le confinement à partir de mars a provoqué une panique générale particulièrement en France où l’activité s’est brutalement et totalement arrêtée. Les comparaisons avec 1929 faisaient florès et des chiffres de chute du PIB annuel dans les pays les plus touchés (France, Italie, Royaume Uni, Espagne…) dépassaient les 20%. Même les interventions des Banques centrales ne permettaient pas d’enrayer la chute des marchés qui s’effondraient de 40% par rapport à leur plus haut touchés quelques semaines plus tôt. Les entreprises cotées étaient totalement désarmées annonçant des pertes de chiffres d’affaires et de résultats gigantesques. Les plans d’aides gouvernementaux n’avaient pas encore été compris, ni assimilé malgré le soutien actif des banques centrales. Le « quoiqu’il en coûte » d’Emmanuel Macron était pourtant réel.

3/ L’impossibilité d’une reprise en V ou plutôt d’une reprise en K.
Alors que les chiffres en provenance de Chine montraient un rebond assez net de la situation économique après son déconfinement, nous n’avons pas cru, à tort, à la forte capacité de rebond des économies, Etats Unis et Asie en tête, notamment dans les secteurs favorisés par la pandémie et le télétravail (tech, santé, distribution alimentaire…). De plus, les marchés étant dans l’anticipation permanente, ils ont très vite tourné la page du Covid, pariant sur une sortie d’un vaccin rapide et la fin du confinement. La crise de février/mars/avril n’est qu’une parenthèse qu’il suffisait d’oublier en se projetant au plus vite en 2021, année du rebond. Pendant ce temps nos stratégistes (Kepler, Valquant, Alpha value,…) nous affirmaient qu’après le rebond d’avril, les marchés repartiraient à la baisse, les dégâts étaient trop importants dans la sphère réelle pour ne pas revenir vers les plus bas de mars. Nous avons été trop prudents et les marchés ont toujours raison, malgré parfois le côté indécent d’un Nasdaq au plus haut alors que les faillites d’entreprises et les cohortes de chômeurs s’annonçaient.

7 bonnes raisons d’être optimistes en 2021.

Il faut rester humble face à l’épidémie virale et ce virus que l’on craignait depuis si longtemps (tout en ayant sérieusement baissé la garde sauf en Asie) n’a pas fini de faire parler de lui d’autant qu’une forme mutante venant d’Afrique du sud et d’Angleterre, beaucoup plus contagieuse va contraindre de nombreux pays à reconfiner. Avec l’arrivée de l’hiver, il serait facile de glisser dans la dépression. Les jours raccourcissent, la lumière est faible et il fait froid. De grands noms nous ont quittés, Giscard, Maradona, Le Carré, Piccoli, Christophe, Devedjan, certains du covid et pourtant en ce début d’année 2021, l’optimisme reste de mise et face à l’adversité, l’homme et la science ont démontré qu’il y avait une parade (ce qui est encourageant pour l’autre sujet un peu oublié : le réchauffement climatique).

1/ La découverte de vaccins en un temps record
C’est une extraordinaire performance scientifique, technologique, industrielle et politique. En moins d’un an, alors qu’en général il faut 5 à 10 ans, 6 entreprises (1 américaine,1 germano-américaine, 1 anglaise, 2 chinoises, 1 russe) ont été capables de trouver un vaccin grâce au
génie humain et au soutien des administrations de leurs pays respectifs. Les 2 premiers dans la course, Pfizer/ Biontech et Moderna constituent une avancée médicale majeure car il s’agit de vaccins à ARN messager qui activent le système immunitaire de l’individu via son code génétique. Leur efficacité est supérieure à 90% et cette technologie pourrait révolutionner également le traitement des cancers.

2/ Une maladie beaucoup mieux maîtrisée
Le génie humain s’est aussi manifesté dans les hôpitaux (malgré une bureaucratie désespérante). La prise en charge des malades atteints du Covid 19 a fait des progrès incroyables en quelques mois engendrant une forte baisse de la mortalité. Les équipes médicales ont appris à mieux employer l’oxygénation, à recourir aux corticoïdes pour contenir les inflammations. Même si le Remdevisir de Gilead ou l’Hydrochloroxyne du professeur Raoult ont montré leur inefficacité, nous avons toujours l’espoir de trouver un traitement efficace. La biotech française Abivax annonçait le 27 décembre avoir obtenu pour son médicament ABX464, capable de traiter l’orage cytokinique, le statut de priorité nationale de recherche.

3/ Les banques centrales encore là pour longtemps
La création de monnaie est devenue la solution. La foi des marchés en cette « potion magique » est totale. Elle n’a pas pour l’instant d’effets secondaire connus : elle ne crée plus d’inflation, ni de hausse des taux, ni de fuite devant la monnaie. C’est un véritable miracle. Comme tout le monde s’y met en même temps, Japon, USA, Europe, RU,… elle ne provoque pas de baisse du taux de change externe. Cette surabondance de monnaie est évidemment associée à la dépense publique. L’ « helicopter money » fonctionne à plein : Aux USA, la distribution de chèques au ménages et en Europe, le chômage partiel de la moitié de la population financé par les QE. Et en plus ce sont les Banques Centrales qui pressent les gouvernements d’en faire plus. La FED, malgré le rebond de l’économie et des perspectives 2021 a priori excellentes a confirmé ses achats au minimum jusqu’à la fin 2021.

4/ Des politiques économiques plus efficaces
Face à une crise exceptionnelle, les gouvernements ont montré une réactivité exceptionnelle pour compenser la chute d’activité et endiguer le chômage. Ils ont appris très vite en adaptant les méthodes de confinement : en France, le deuxième (ou second) confinement light a enrayé la propagation du virus en faisant chuter l’activité deux à trois fois moins qu’au premier confinement. Ils ont en réalité confiné les inactifs donc les retraités et les personnes âgées les plus à risque et permis aux enfants d’aller à l’école et à la grande majorité des salariés de travailler. Les entreprises ont pu globalement fonctionner normalement au dernier trimestre.

5/ Les vainqueurs et les vaincus : une reprise en K pour longtemps sans doute.
La machine schumpetérienne de destruction créatrice n’a pas encore fait son oeuvre du fait des mesures de soutien déployées pour éviter les faillites des entreprises les plus fragiles mais lorsque ces mesures cesseront, la réalité sautera aux yeux. Le Covid a accéléré les tendances et le digital va sortir grand gagnant de cet épisode avec la santé remise au premier plan et l’écologie, pour trouver un nouveau sens à un monde globalisé qui a démontré ses limites.
Même si à court terme, les valeurs de l’ancien monde (banques, auto, industrie, immobilier commercial…) peuvent rebondir comme elles l’ont fait en novembre, la tendance de fond est nettement en faveur des “vainqueurs » du Covid.

6/ Une épargne abondante qui va continuer de se déployer
Pour la première fois, ce sont les particuliers qui ont été les premiers à revenir sur les marchés au printemps : les fameux millenials américains du site Robinhood mais aussi les européens et chose incroyable même les français qui ont occupé leur longue journée de confinement à boursicoter, riches des économies réalisées en ne dépensant plus rien. En France, 200 mds € ont été ainsi épargnés en 2020 et aux Etats Unis, les américains ont épargné des sommes colossales avec des revenus en hausse (merci M Trump et M Powell) malgré les destructions massives d’emploi concentrées sur les bas salaires, et des dépenses en nette baisse. Entre mars et novembre, l’épargne cumulée a augmentée de 1 500 Mds $ par rapport à 2019. Cet argent s’est déployé sur les bourses et ce n’est pas fini mais aussi dans l’immobilier d’habitation.

7/ L’arrivée de Joe Biden à la présidence des Etats Unis après 4 années de présidence Trump éprouvantes.
Nous ne critiquerons pas Donald Trump, ce n’est pas notre rôle et il aurait probablement été réélu si le Covid n’avait pas existé tant son bilan économique jusqu’en février 2020 était bon. Mais ses méthodes de gouvernance à coups de tweets, d’insultes et de rapports de force permanents étaient épuisants. Et son dernier fait d’arme conduisant ses partisans exaltés à envahir le Capitole est désolant pour la démocratie américaine fracturée et irréconciliable. La tâche de Joe Biden va être difficile mais fort d’une majorité aux 2 chambres du congrès, il va pouvoir appliquer son programme de campagne. Ce programme est d’une ampleur considérable. Le plan des démocrates porte sur 7 000 Mds de $ en 10 ans, soit le tiers du PIB et 3% par an, pour relancer et transformer l’ensemble de l’économie américaine. Si on ajoute à ce montant les mesures de soutien pour lutter contre la crise sanitaire, la stimulation budgétaire est du même ordre de grandeur que le « New Deal » de Roosevelt dans les années 30. Avec Janet Yellen au Trésor et Jerome Powell à la Fed, la nature du financement de ces dépenses ne fait pas débat, au moins à court terme. Les Etats Unis vont continuer à monétiser la dette publique et maintenir les taux très bas.

Mais dès que l’économie repartira pour de bon sans crainte d’une nouvelle pandémie, et si le succès de la politique de relance des démocrates est au rendez-vous, la politique de la FED devra changer en abandonnant QE et taux 0. C’est à ce moment qu’il faudra vendre ses actions et acheter du $.

Nous n’en sommes pas encore là. D’ici là, les planètes restent alignées même si les marchés peuvent paraître très chers et que l’on commence à parler de bulle. Nous sommes donc prudemment optimistes pour les 6 prochains mois.